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5 octobre 2020

Les nouvelles restrictions COVID du Québec sont à la fois strictes et déconcertantes. Des millions de Québécois des « zones rouges » devront vivre sous eux pendant au moins un mois. Le gouvernement provincial se tourne vers la police – avec des pouvoirs accrus conçus pour entrer rapidement dans les maisons des gens – pour assurer la conformité de la population. C'est une recette pour des violations des droits à une échelle immense et c'est une approche fondamentalement contre-productive pour atteindre les objectifs de santé publique.

Pour que les gens suivent les règles, elles doivent être claires. Clairement écrit, clairement expliqué. Les nouvelles restrictions COVID du Québec échouent sur les deux fronts.

Cette langage juridique est byzantine, combinant et modifiant les règles énoncées dans plusieurs ordres juridiques qui se chevauchent. Même lorsque les règles sont claires, elles sont aussi souvent difficiles à suivre. Quiconque a vécu dans un centre urbain pendant cette pandémie connaît l'impossibilité de naviguer dans les rues de la ville avec une bulle de deux mètres autour de vous à tout moment.

La messagerie publique n'a pas aidé. Tel que résumé par la SRC, le sentiment public qui règne est la confusion. Lors d'une conférence de presse jeudi, le premier ministre Legault a été parsemé de questions de bon sens des journalistes : les enfants d'une même classe peuvent-ils jouer ensemble dans le parc? Deux personnes peuvent-elles partager la même voiture ? Deux mères peuvent-elles marcher ensemble si leurs enfants sont en poussette ? À un moment donné, il est devenu exaspéré et a simplement exhorté les gens à utiliser leur « bon sens ».

Et c'est là que réside le problème. Ce ne sont pas des recommandations de santé publique, sous réserve de ce qui « fait sens » dans les nuances et les détails de la vie quotidienne. Ce sont des lois. Règles strictes. Et la non-conformité est passible de lourdes sanctions légales. Le premier ministre dit qu'il faut faire preuve de bon sens, mais il n'a pas légiféré quelque chose qui exige simplement du bon sens. Beaucoup de bon sens se retrouveront avec un ticket $1500.

Alors qui sera l'arbitre sur le terrain de la loi et du bon sens ? La police.

La police du Québec a été spécifiquement informée qu'elle doit être en force pour assurer la conformité. La police a également eu accès à des télémandats rapides, dans le but déclaré d'entrer rapidement dans les maisons des gens, sans le consentement des résidents. Parce que les lois sous-jacentes sont si larges - la ligne de base dans la zone rouge n'est pas de rassemblements intérieurs ou extérieurs - il existe de nombreux rassemblements «suspects» sur lesquels la police pourrait vouloir enquêter. Le potentiel d'abus – fouilles abusives, détentions arbitraires, profilage racial et harcèlement – est immense.

Il s'agit d'une crise de santé publique, pas d'une crise d'ordre public. Nous avons besoin que les gens aillent se faire dépister. Pour suivre les conseils de santé publique. Pour être franc au sujet du dîner qu'ils ont eu la nuit avant d'avoir un test COVID positif. Et de savoir où aller pour recevoir le soutien dont ils ont besoin s'ils n'ont pas d'endroit sûr où vivre ou s'isoler.

Si un gouvernement pouvait sévir contre un virus, il le ferait, mais il ne peut pas, littéralement, sévir contre un virus. Alors le Québec s'est tourné vers les bâtons. Des bâtons brandis non pas contre le virus, mais contre les gens qui ont élu ce gouvernement.

Les bâtons du Québec sont de lourdes amendes et ils sont brandis par la police. Le seul message qui est clairement et clairement, c'est que la maison d'une personne n'est pas son château. La police peut et va s'inviter, a-t-on dit et entendu haut et fort.

C'est effrayant pour beaucoup, surtout ceux qui ont déjà peur de la police. Beaucoup de personnes appartenant à des communautés racialisées et autochtones ne savent que trop bien ce que signifie pour elles une présence et des pouvoirs accrus de la police. Les mesures répressives empêchent de fournir des services et des soutiens aux membres de la communauté qui en ont le plus besoin.

Ces leçons auraient dû être claires dès la première vague de COVID.

Comme démontré par Le rapport de juin de l'ACLC  sur une application trop zélée, la Colombie-Britannique a pu aplatir sa courbe COVID initiale presque exclusivement avec des recommandations de santé publique et l'éducation, les tests et la recherche des contacts. Ils ont donné des conseils clairs et calmes. La population a répondu. Des experts en santé publique ont assuré le suivi. Le virus a été contrôlé. Le Québec, en revanche, s'est rapidement tourné vers la police et des amendes punitives pour contraindre la population au confinement. Les infections ont grimpé en flèche. Et au moment où la première vague est passée, la police avait distribué des milliers de contraventions – le plus grand nombre du pays – et plus de 10 millions de dollars d'amendes.

Nos discussions avec des individus et des organisations sur le terrain lors de la première vague au Québec ont éclairé les conclusions de notre rapport et a confirmé nos pires craintes : les personnes les plus marginalisées et criminalisées ont souffert lorsque la police a été déployée en première ligne d'une crise de santé publique. Comme on pouvait s'y attendre lorsque la police est déployée en première ligne d'une crise de santé publique, les personnes les plus marginalisées et criminalisées ont souffert. Juste la semaine dernière des dizaines d'organisations et de militants de la société civile québécoise se sont joints pour demander une amnistie complète pour ceux qui ont été étiquetés dans la première vague du Québec. Ils ont souligné l'augmentation de la répression policière et de la discrimination qui a suivi l'approche punitive du Québec, des fardeaux qui ont été assumés de manière disproportionnée par ceux qui supportent traditionnellement le poids d'un excès de police et d'une criminalisation inutile. Les Noirs, les Autochtones urbains et éloignés et d'autres groupes racisés et marginalisés, y compris les sans-abri et les personnes mal logées, les migrants, les communautés LGBTQ2S+, les travailleurs du sexe, les personnes qui consomment des drogues et les personnes vivant avec des problèmes de santé mentale.

Mais au lieu de s'engager de manière significative avec l'efficacité et les impacts négatifs de se tourner vers l'application de la loi, le gouvernement du Québec a doublé son approche punitive. C'est une mesure qui servira à marginaliser ceux qui ont le plus besoin de soutien. Galvaniser ceux qui déjà se méfient et en veulent au gouvernement. Et saper le travail essentiel de santé publique qui devrait être au cœur de la réponse du gouvernement.

À propos de l’association canadienne sur les libertés civiles

L’ACLC est un organisme indépendant à but non lucratif qui compte des sympathisant.e.s dans tout le pays. Fondé en 1964, c’est un organisme qui œuvre à l’échelle du Canada à la protection des droits et des libertés civiles de toute sa population.

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