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14 décembre 2020

Rt. Hon. Justin Trudeau
L'honorable Patty Hajdu
L'honorable David Lametti
Gouvernement du Canada
Ottawa, ON

Par courriel : justin.trudeau@parl.gc.ca

Chers ministres,

Nous vous écrivons au sujet de la mauvaise idée lancée d'un podium exécutif de l'Ontario concernant les passeports d'immunité, ainsi appelés. À cet égard, les Canadiens méritent une approche nationale, pour d'innombrables raisons. Nous réduirions nos préoccupations en matière de libertés civiles à cinq. Ces préoccupations ne sont pas liées au choix individuel de se faire vacciner. Nous sommes anti-oppression, anti-discrimination, pas anti-vaccins.

Mais d'abord, il faut dire que le défi global des droits de l'homme avec les passeports d'immunité découle de la déconnexion entre les moyens et les fins. Comme vous le savez bien, le but du vaccin est d'atteindre le seuil d'immunité collective, à partir duquel la proportion de la population immunisée contre la maladie est supérieure au pourcentage de la population capable de contracter la maladie pour qu'elle se propage. Ce seuil franchi, toute la communauté est protégée – pas seulement les personnes immunisées. L'immunité collective permet de protéger la population d'une maladie, y compris ceux qui ne peuvent pas être vaccinés, comme les nouveau-nés ou ceux dont le système immunitaire est affaibli.

Si le but d'un passeport d'immunité est de contraindre l'inoculation, alors cela soulève la question de la liberté individuelle et du traitement médical mandaté par le gouvernement, discuté ci-dessous. Mais les gouvernements canadiens disent qu'ils n'exigent pas l'inoculation. Par conséquent, le but du passeport d'immunité, ou passeport d'immunisation, n'est pas lié au franchissement du seuil d'immunité collective. S'il ne s'agit pas d'immunité collective, dirions-nous, alors son objectif est erroné et trompeur.

Il est erroné en raison de ses conséquences négatives sur les droits de l'homme, discutées ci-dessous. C'est trompeur, car la possession d'un dossier de vaccination n'équivaut pas, en fait, à une immunité ou à une preuve de non-infection. L'absence de passeport ne signifie pas non plus que la personne est porteuse du COVID, ou autrement susceptible. Les inoculés pourraient être infectés – ils pourraient être l'un des rares pour lesquels le vaccin échoue – tout comme les non inoculés pourraient être immunisés. Le seuil d'immunité collective peut être atteint malgré ces exceptions, c'est pourquoi les passeports d'immunité mettent la charrue avant les bœufs.

« Passeport d'immunité » : les 5 principaux torts aux droits humains

Intimité: permettre à des entités privées de recueillir ou d'utiliser des renseignements personnels sur la santé a des implications inquiétantes sur la vie privée. Exiger des individus qu'ils présentent une preuve de vaccination, c'est-à-dire la preuve d'une décision médicale personnelle, afin de participer à la vie publique est intrinsèquement intrusif. La question constitutionnelle est de savoir si une telle intrusion dans la vie privée est proportionnée aux avantages pour la santé publique, en particulier compte tenu de l'absence actuelle de preuves empiriques concernant les protections conférées par l'un des vaccins. De tels outils nécessiteraient également la capacité d'identifier ceux pour lesquels la vaccination est médicalement exclue en raison de conditions préexistantes, et le partage de ces informations est encore plus envahissant pour la vie privée. Même un choix ostensiblement protecteur de la vie privée, tel que limiter les informations sur un document de preuve (par exemple, à « vacciné », « non vacciné » ou « médicalement exempt ») révélerait toujours des renseignements personnels sur la santé. Cela est d'autant plus vrai que pour qu'une telle preuve soit largement acceptée et responsable, une liste de conditions qui rendraient une personne exemptée devrait être accessible au public. Si la preuve est intégrée à une application numérique plutôt qu'à un jeton physique, que ce soit CANImmunise ou un autre outil, des problèmes de confidentialité supplémentaires surviennent.

Mobilité: la pandémie a provoqué des érosions sans précédent des droits de mobilité pour les personnes à travers le Canada, et un patchwork provincial/territorial de jetons ou d'applications de preuve de vaccination aggraverait le problème. Le leadership fédéral est impératif pour s'assurer que le statut vaccinal et les outils utilisés pour le démontrer ne deviennent pas un autre élément de division des mesures de contrôle frontalier déjà problématiques instituées dans certaines juridictions canadiennes. Les Canadiens ont des droits constitutionnels à la mobilité : une province ou un territoire ne peut refuser l'entrée ou des services aux résidents d'une autre juridiction canadienne. Si une juridiction cherche à légiférer ou à réglementer contrairement à ce droit, le gouvernement national a un rôle évident à jouer pour restaurer la mobilité de tous les Canadiens.

Égalité (handicap/santé) : le choix de se faire vacciner n'est pas ouvert à certains Canadiens. Il y en aura certains avec des conditions médicales ou des handicaps préexistants où la vaccination serait contre-indiquée, dont la portée reste inconnue. L'expérience récente au Royaume-Uni avec le vaccin Pfizer et les personnes hautement allergiques démontre clairement cette incertitude, qui sera amplifiée à mesure que chaque nouveau vaccin arrivera sur le sol canadien. Nous avons noté ci-dessus, au sujet de la protection de la vie privée, qu'un régime de certificats d'immunité qui présuppose l'accès aux espaces, aux entreprises et aux services publics ou privés en fonction du statut vaccinal exigerait que toutes ces personnes divulguent, sur une base potentiellement régulière, l'existence de leur conditions médicales, sinon les détails, à un éventail potentiellement large d'organisations. Mais forcer les personnes qui ont des problèmes de santé ou des handicaps à s'engager dans cette divulgation n'est pas seulement une atteinte à la vie privée, c'est aussi fondamentalement discriminatoire à l'égard de ces groupes qui ont le plus besoin de protections des droits humains pour assurer un traitement égal sur les lieux de travail et dans la vie publique.

Égalité (discrimination fondée sur d'autres motifs d'égalité) : tous les membres de notre société ne courent pas le même risque ou n'ont pas les mêmes moyens de traverser une pandémie tout en préservant leur santé, leur sécurité et leurs revenus. Les travailleurs de première ligne dans les services et le commerce de détail sont souvent des femmes, souvent de nouvelles arrivantes, souvent racialisées et souvent en situation d'insécurité financière. Un régime de certificats d'immunité qui présuppose la présence sur le lieu de travail ou la participation à une série d'activités sociales sur preuve de vaccination aura un impact disproportionné sur les personnes qui ont peu de pouvoir social ou politique pour résister. En tant qu'hon. Rosalie Abella le dit : « nous ne devons jamais oublier à quoi ressemble le monde pour ceux qui sont vulnérables. »1 Les vulnérables, après tout, ont tendance à être relégués à l'arrière du bus, au bout de la les derniers à se faire vacciner et les moins susceptibles de produire un passeport d'immunité, en raison de leur statut socio-économique, de leur incapacité sociale, économique et psychologique et des obstacles préexistants aux deux. Ce double désavantage est une raison suffisante pour que votre gouvernement empêche que cela se produise au Canada.

Liberté (coercitive): Les effets coercitifs potentiels sont intimement liés aux impacts discriminatoires des certificats d'immunité. Les politiques qui facilitent (ou l'absence de politiques/lois interdisant) que le statut vaccinal devienne la clé d'une pleine participation à la vie publique risquent de rendre obligatoire de facto un régime de vaccination volontaire, via des impacts coercitifs diffus. Si une preuve de vaccination est requise pour entrer dans les commerces, emprunter les transports en commun, aller au théâtre ou à un événement sportif (toutes des options qui ont été proposées par différents élus), cela aura inévitablement un effet coercitif sur le processus décisionnel que les individus doivent s'engager lorsqu'on se demande s'il faut se faire vacciner. Un consentement significatif est requis pour que le volontariat soit authentique, et le consentement forcé et sanctionné par l'État n'atteint pas ce seuil. Les politiques qui incitent à choisir de se faire vacciner, comme le récent programme de soutien aux blessés vaccinaux annoncé le 10 décembre par le Premier ministre, font un bien meilleur travail de protection des droits en soutenant les décisions des individus de choisir la vaccination plutôt que de pénaliser leur décision légalement valable de renoncer à la vaccination.

Pour conclure, il faut un leadership fédéral fort pour s'assurer que les résidents de partout au Canada puissent exercer de manière significative leur droit de prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé et prendre la décision volontaire de participer au déploiement de la vaccination pour se protéger et protéger leurs proches contre COVID-19 [FEMININE.

Votre gouvernement a créé un précédent avec le développement et le soutien de l'application COVID Alert, qui a émergé sous le leadership fédéral avec l'engagement actif des provinces et des territoires. Ce même leadership est nécessaire pour garantir qu'une preuve de vaccination nécessaire, à des fins de santé valides telles qu'un suivi approprié de la vaccination, ne devienne pas un passeport immunitaire, utilisé soit en tant que politique, soit en l'absence de contraintes pour créer des espaces de décision coercitifs ou violer les droits de toute personne au Canada, y compris nos plus vulnérables qui sont les plus à risque de discrimination. L'ACLC demande au gouvernement du Canada de veiller à ce que tous les outils créés ou utilisés dans le cadre d'un programme de vaccination de masse protègent la vie privée et soient créés et utilisés d'une manière qui respecte la lettre et l'esprit des lois qui protègent notre liberté, notre égalité, notre vie privée, et les droits de mobilité à travers le Canada.

Votre sincèrement,
Michael Bryant, directeur général de l'ACLC
Par Association canadienne des libertés civiles

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