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Un élu peut-il bloquer un électeur critique sur Twitter ? Qu'en est-il de poursuivre un autre représentant pour diffamation ? Quel contrôle les politiciens ont-ils sur leur réputation en ligne et dans quelle mesure devraient-ils le faire ?

Avec une élection fédérale à l'horizon, les électeurs s'appuieront sans aucun doute sur une grande quantité de contenu en ligne et de discussions sur les réseaux sociaux pour les aider à prendre des décisions concernant les candidats. À l'approche d'octobre 2019, ceux qui espèrent être élus seront particulièrement prudents quant à leur présence en ligne. Les candidats s'assureront non seulement qu'ils ne publient rien qui pourrait leur faire perdre des votes, mais veilleront également à ce que d'autres ne publient pas d'éléments qui pourraient nuire à leurs chances. La gestion de la réputation en ligne est une grosse affaire, pas seulement pour ceux qui vendent des produits et des services. La réputation est une monnaie dans la sphère politique. Les politiciens sont particulièrement incités à s'assurer que l'enregistrement en ligne les présente sous le meilleur jour possible, même si cela implique de faire taire les voix critiques ou gênantes.

Si vous n'êtes pas déjà un représentant élu, il y aura probablement moins de contenu en ligne à votre sujet, et vous aurez peut-être même la possibilité de supprimer certains de ces tweets ou publications Instagram embarrassants avant que quiconque ne pense à prendre une capture d'écran pour la postérité. Cependant, à mon avis, les élus ont des devoirs et des responsabilités constitutionnels particuliers envers leurs électeurs – et cela signifie qu'ils peuvent avoir besoin d'avoir la peau plus épaisse lorsqu'il s'agit de critique en ligne. La question pour ceux qui sont déjà aux yeux du public est la suivante : quand se défendre commence-t-il à ressembler à un silence brutal de vos critiques ?

Récemment, l'ACLC a appris qu'une femme avait été bloquée par son député fédéral sur Twitter. Le député John Brassard (Barrie-Innisfil, Ontario) a décidé que les critiques que cet électeur a formulées à son sujet sur Twitter méritaient des représailles. Elle n'a plus le privilège de recevoir des notifications sur ses tweets ou des mises à jour régulières sur ce qu'il fait au Parlement au nom de sa communauté. Lorsqu'elle a demandé à son personnel pourquoi elle était bloquée, une réponse a été qu'elle était "une femme avec des opinions très fortes". Ils lui ont également dit qu'elle avait "menacé de harceler" le député - ceci en réponse à sa promesse d'être aux événements de campagne et d'essayer de corriger toute désinformation qu'elle pensait qu'il répandait sur le changement climatique. Ce n'est pas du harcèlement; c'est l'engagement politique, et les candidats devraient se réjouir de l'opportunité de s'engager avec des citoyens informés. Ces réponses suggèrent une incompréhension fondamentale du fonctionnement du processus politique.

Brassard a également récemment lancé une poursuite en diffamation $100 000 et a déposé une plainte auprès du commissaire à l'intégrité de Barrie concernant une publication sur Facebook faite par le conseiller municipal de Barrie Keenan Aylwin. Publié quelques jours seulement après les massacres de Christchurch, Aylwin a critiqué Brassard et un autre député de la région de Barrie, Alex Nuttall, pour avoir omis de s'exprimer sur ce qu'Aylwin a qualifié de « l'apparition d'Andrew Scheer sur la même scène qu'un sympathisant néo-nazi, Faith Goldy, à un rallye United We Roll. Aylwin soutient que les députés « jouent aux pieds avec les suprémacistes blancs ». Brassard dit que la déclaration est fausse et diffamatoire et qu'elle viole le Code de conduite des conseillers de Barrie. Le commissaire à l'intégrité semble être d'accord avec Brassard et Aylwin pourrait faire face à des conséquences de la part du conseil lorsqu'il portera l'affaire devant lui.

À mon avis, ces actions montrent une méconnaissance de l'importance de la liberté d'expression au Canada, particulièrement lorsqu'il s'agit de discours politique. Je ne pense pas que quiconque – élu ou non – doive se soumettre à un harcèlement répété dans le monde réel ou en ligne. Cependant, ce n'est pas ce qui se passe dans l'un ou l'autre de ces deux cas. Un élu va faire face à des critiques, dures, excessives, ou pire : raisonnables et éloquentes. Si le récit est trompeur ou tout simplement faux, un représentant élu a des moyens de corriger le dossier. À l'approche d'octobre 2019, les Canadiens devraient s'attendre à ce que les candidats contribuent à notre débat politique, et non qu'ils l'étouffent. Faire taire les critiques n'est pas la solution.

Aux États-Unis, les tribunaux ont déjà statué qu'un agent public qui bloque un électeur de son fil Twitter a violé la protection de la liberté d'expression du premier amendement. Je pense qu'un tribunal canadien pourrait bien constater une violation de la Charte dans des circonstances similaires puisque ces espaces en ligne sont devenus nos nouvelles places publiques. Si ces outils de médias sociaux sont utilisés pour connecter les représentants avec leurs électeurs, ils doivent prendre le bon avec le mauvais. Bloquer un électeur et poursuivre le conseiller municipal envoie un message clair à ceux qui souhaitent s'engager avec Brassard sur des questions de politique : faites preuve de légèreté.

Ce genre de refroidissement est terrible pour notre démocratie.

À propos de l’association canadienne sur les libertés civiles

L’ACLC est un organisme indépendant à but non lucratif qui compte des sympathisant.e.s dans tout le pays. Fondé en 1964, c’est un organisme qui œuvre à l’échelle du Canada à la protection des droits et des libertés civiles de toute sa population.

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