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Les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale sont défendus par le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) depuis 1984. L'agence et ses activités sont depuis restées secrètes. Ce mémoire tentera de dissiper une partie de ce secret en présentant un résumé de l'histoire du SCRS et un aperçu de sa forme législative. Dans le processus, les lacunes et les changements à venir pour l'agence seront également discutés.

L'HISTOIRE

Le SCRS a ses racines dans la crise d'octobre de 1970. L'enlèvement de James Cross et le meurtre de Pierre Laporte qui s'en est suivi par des membres extrémistes du FLQ ont amené le premier ministre Pierre Trudeau à affecter le Loi sur les mesures de guerre. Reconnaissant que la menace aurait pu être évitée, la GRC a créé le Service de sécurité pour recueillir des informations sur les menaces futures. La branche n'a pas maintenu longtemps son rôle purement informatif. Il a rapidement commencé à s'engager dans diverses formes de subversion et de perturbation qui sont restées largement indétectables jusqu'au milieu des années 70.[1].

La conduite du Service de sécurité est devenue de plus en plus flagrante, aboutissant à l'incendie d'une grange pour perturber une réunion entre le FLQ et les Black Panthers en 1972[2]. Lorsque leurs méfaits ont finalement été révélés, une commission a été établie sous la direction du juge David MacDonald en 1977. La commission a présenté ses conclusions en 1983. Le rapport a décrit une variété d'actes illégaux de subversion perpétrés par la GRC, notamment l'espionnage de citoyens. et la présentation de faux communiqués comme preuve dans les procédures judiciaires[3].

La Commission MacDonald a attribué les méfaits de l'organisation à l'absence d'un mandat clair et à la réticence des politiciens à s'ingérer dans le travail de la police. Quoi qu'il en soit, la commission a refusé d'admettre qu'une agence de sécurité nationale était inutile. La commission a souligné que l'objectif d'une agence devrait être « d'assurer la démocratie contre ses ennemis internes et externes sans détruire la démocratie dans le processus »[4]. Il a plaidé en faveur de la création d'un service civil de collecte de renseignements doté d'un mandat juridique bien établi.

Plus tard cette année-là, un projet de loi a été déposé en réponse à ces recommandations, créant le Service canadien du renseignement de sécurité. Le projet de loi a d'abord fait l'objet de vives critiques concernant l'étendue des pouvoirs qu'il conférait à l'agence. Notamment, l'agence aurait eu le pouvoir de se livrer à « tout autre acte ou chose raisonnablement nécessaire », lui donnant le feu vert pour opérer en dehors de la loi. Le Parlement a finalement cédé aux critiques et a renvoyé le projet de loi à un comité sénatorial dirigé par l'ancien secrétaire du cabinet Michael Pitfield. Le comité a produit un certain nombre d'amendements recommandés, tout en maintenant l'importance de confiner le SCRS à la collecte de renseignements et non à l'application de la loi[5].

Le Parlement a incorporé ces amendements et le projet de loi modifié a reçu la sanction royale en 1984 en tant que Loi sur le SCRS. Bien que les pouvoirs du SCRS aient été restreints par le biais d'audiences en comité, son mandat était encore assez large. Le Parlement a rétréci sa définition initiale de « menaces contre tout État allié ou associé au Canada » en faveur d'une définition qui englobe les préjudices les plus immédiats. Cependant, la définition conférait toujours au SCRS un pouvoir très large de recueillir et de conserver des renseignements. Le cadre de l'organisation était relativement intact jusqu'aux amendements du gouvernement Harper en 2015[6].

LE SCRS MODERNE

Le chant du cygne de l'ancien premier ministre Harper, le Loi antiterroriste, 2015, éloigne encore plus le SCRS de sa conception originale de la commission MacDonald. Avec un mandat inchangé, le SCRS peut désormais prendre des mesures directes pour contrer les menaces. La seule réserve à ce droit positif est que l'agence ne peut pas causer de préjudice, de mort ou de blessure. Le SCRS a maintenant le pouvoir explicite de contrevenir à la Charte des droits et libertés et le droit canadien. Ces actions doivent être autorisées par un juge de la cour fédérale, mais ces procédures sont (ironiquement) soumises à de sévères limitations de la vie privée[7].

Les opérations du SCRS sont assujetties à la surveillance du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSRS). Le CSARS doit pouvoir accéder à tous les renseignements détenus par le SCRS et mesurer son rendement par rapport aux seuils prescrits par la loi. Les commentateurs ont salué le rôle joué par le CSARS mais déplorent son manque de ressources. La surveillance d'une organisation dotée d'un si large éventail de pouvoirs et de compétences est une tâche herculéenne, exacerbée par un personnel insuffisant et des erreurs de gestion. L'autorité élargie accordée au SCRS éparpille encore plus un CSARS tendu[8].

SUR L'HORIZON

Le gouvernement Trudeau était motivé par les problèmes saillants des modifications de 2015 visant à rédiger la plus grande refonte du SCRS depuis sa création. Au moment de la rédaction du présent document, le projet de loi n'a pas encore été adopté et est actuellement devant le Sénat, mais il propose des changements bienvenus. Premièrement, il ajoute des contraintes importantes à l'autorité interventionniste du SCRS, notamment une interdiction de la torture et de la détention. Le SCRS doit maintenant agir conformément à la Charte et toute immunité de la loi qui lui est accordée apparaît dans la loi[9].

Ces nouveaux pouvoirs seront revus par un nouveau « super-SIRC ». L'agence sera désormais en mesure d'accéder aux informations de tous les départements, d'exiger des examens au sein de ces départements et d'entendre les plaintes. L'ensemble crée une agence d'examen capable d'identifier et d'intervenir dans les opérations du SCRS. Mais, alors que la nouvelle législation donne du mordant à l'agence d'examen, il est difficile de savoir si elle contrôlera suffisamment de ressources pour exercer adéquatement ce pouvoir[10].

CONCLUSION

En résumé, le SCRS moderne se rapproche de celui envisagé par la Commission MacDonald. Protéger la sécurité nationale du Canada est une tâche peu enviable qui oblige les législateurs à constamment lutter contre le maintien des droits civils. Il est cependant possible d'en avoir un sans sacrifier l'autre. Une agence de sécurité nationale ne garde vraiment à l'esprit les intérêts des personnes qu'elle protège que si elle est fondée sur la responsabilité, la transparence et la primauté du droit.

 

[1] Craig Forcese et Kent Roach, Fausse sécurité : la radicalisation de l'antiterrorisme canadien (Toronto : Irwin Law, 2015) à la p. 25.

[2] RC MacLeod, « Gendarmerie royale du Canada (GRC) » (7 février 2006), en ligne : L'Encyclopédie canadienne <https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/royal-canadian-mounted-police>

[3] Ian Cameron, « Commission d'enquête concernant certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada. Deuxième rapport : « Liberté et sécurité de la loi » (1985) 48 Mod LV 201.

[4] Idem à 203.

[5] Supra note 1 à 42

[6] Idem à 45 ans

[7] Craig Forcese et Kent Roach « Bill C-51 Backgrounder #2: The Canadian Security Intelligence Service's Proposed Power to « Reduce » Security Threats through Conduct that May Violate the Law and Charter » (2015) [Non publié, archivé à SSRN (https://ssrn.com/abstract=2564272)].

[8] Idem. Voir aussi Roy Atkey « La surveillance du SCRS est bien vivante », Le Globe and Mail (3 février 2015), https://www.theglobeandmail.com/opinion/csis-oversight-is-alive-and-well/article22750488/

[9] Craig Forcese, « Bill C-59 and the Judicialisation of Intelligence Collection » (2018) Document de travail de la Faculté de droit d'Ottawa n° 2018-13.

[10] Idem

À propos de l’association canadienne sur les libertés civiles

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