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vendredi 15 mai 2020

Hon. Bloyce Thompson
Ministre de la Justice et de la Sécurité publique
Gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard
4e étage sud, édifice Shaw
95, rue Rochford
Case postale 2000
Charlottetown, PE CIA 7N8

PAR EMAIL

Re: Droits de mobilité et voyage à l'Î.-P.-É.

Cher Ministre,

Nous vous écrivons au sujet de l'arrêté ministériel que vous avez émis le 30 avrilth, 2020 qui interdit tout voyage « non essentiel » dans la province de l'Île-du-Prince-Édouard. Cette ordonnance a pour effet d'interdire aux résidents d'une province d'entrer dans une autre. Son objectif même est de violer les droits de mobilité des Canadiens qui ne résident pas à l'Île-du-Prince-Édouard, contrairement à l'article 6 de la Charte des droits et libertés. En tant que surintendant de la primauté du droit dans la province, vous aurez examiné cette ordonnance pour déterminer ses risques constitutionnels. En bref, nous encourageons un deuxième regard sur cet Ordre, à la lumière de ce qui suit.

En ce qui concerne les droits de mobilité, conformément au paragraphe 6(2) de la Charte, les individus peuvent élire domicile dans n'importe quelle province et ont le droit de gagner leur vie dans n'importe quelle province. Les droits de mobilité des Canadiens sont sacro-saints; même la clause nonobstant de la Loi constitutionnelle de 1982 ne peut écarter leur application. Les seules dérogations à l'article 6 qui sont autorisées sont celles qui peuvent être justifiées en vertu de l'article 1 de la Charte, c'est-à-dire celles qui sont à la fois raisonnables et manifestement justifiées. À notre avis, les restrictions de la province sur les déplacements non essentiels ne sont ni l'une ni l'autre.

L'ordonnance la plus récente du médecin hygiéniste en chef de l'Î.-P.-É. (datée du 8 mai 2020) exige que les personnes entrant dans la province répondent à toutes les questions posées, y compris les questions relatives aux symptômes, aux coordonnées et à la raison de leur entrée dans la province. De plus, toutes les personnes entrant dans la province après le 21 mars 2020 sont tenues de s'isoler pour la durée de leur séjour (si moins de 14 jours), sous réserve d'exceptions limitées. En plus de cela, il existe l'ordonnance susmentionnée du 30 avril 2020 interdisant tous les voyages «non essentiels» à l'Île-du-Prince-Édouard. La superposition de ces restrictions elles-mêmes dément leur suffisance constitutionnelle. S'il existe des preuves que l'une est justifiée, il s'ensuit que l'autre est disproportionnée.

On ne sait pas pourquoi l'exigence d'auto-isolement serait considérée comme insuffisante pour gérer le risque pour la santé publique posé par la pandémie de COVID-19 ; ou, pourquoi le voyage « non essentiel » à l'Île-du-Prince-Édouard pour les non-résidents est insuffisant sans les ordonnances de mars et mai, ou vice versa. Enfin, votre province accumule les restrictions à un moment où la courbe s'aplatit à l'échelle nationale et mondiale, tandis que votre propre province, heureusement, n'a, à l'heure où nous écrivons, aucun cas actif. Autrement dit, en l'absence de preuve qu'une ou plusieurs de ces restrictions sont inefficaces, la mesure la plus restrictive est inconstitutionnelle, car elle n'est ni nécessaire ni proportionnée. Le résultat final est que les droits de mobilité des Canadiens sont réduits à néant par vos ordonnances de gestion des urgences.

Nous ne suggérons pas qu'il existe une solution unique pour la gestion des urgences au Canada. Il va sans dire que votre province a des considérations particulières propres à l'Île-du-Prince-Édouard. Chaque province et territoire a adopté une approche de gestion des urgences qui correspond à la santé publique particulière et aux circonstances particulières de la région. Mais tous doivent le faire dans les limites de la Constitution.

L'ACLC est une ONG indépendante à but non lucratif, qui s'oppose au pouvoir et défend la liberté au Canada depuis 1964. Nous avons comparu devant les tribunaux à travers le Canada des centaines de fois et avons entamé des poursuites contre des gouvernements pendant COVID-19 dans d'autres juridictions. Nous vous serions reconnaissants d'avoir l'opportunité de discuter de tout cela avec vous-même ou vos fonctionnaires, et nous serions reconnaissants de votre attention sur cette question importante.

Michael Bryant
Directeur exécutif

Cara Zwibel
Directrice du programme Libertés fondamentales

À propos de l’association canadienne sur les libertés civiles

L’ACLC est un organisme indépendant à but non lucratif qui compte des sympathisant.e.s dans tout le pays. Fondé en 1964, c’est un organisme qui œuvre à l’échelle du Canada à la protection des droits et des libertés civiles de toute sa population.

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